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Défricher le répertoire oublié

Publié le 10.08.2015

 




En 2011, le monde de la musique célébrait l’année Liszt. Adalberto Maria Riva donnait cet été-là un récital dans l’Eglise Saint-Germain, à Genève, en hommage au grand compositeur et pianiste hongrois. Les Concerts d’été à Saint-Germain accueillent le pianiste italien quatre ans plus tard, les 23 et 24 août prochains. Au programme de ces deux soirées dédiées au piano ? On retrouve l’incontournable Liszt, mais aussi Emile-Jaques Dalcroze ou une compositrice genevoise moins connue, Caroline Boissier-Butini.

 

Fleurs mélodiques des Alpes

« J’ai choisi des extraits de mélodies composées par Liszt quand il a séjourné en Suisse, d’abord à Genève, ensuite à Lausanne et Fribourg. Liszt résidait à Genève et y a enseigné au Conservatoire lorsque celui-ci a ouvert ses portes en 1835 », détaille Adalberto Maria Riva. Les Fleurs mélodiques des Alpes, recueil de neuf pièces, sont issues de l’Album d’un voyageur. Adalberto Maria Riva en interprétera deux extraits offrant une plongée dans la tradition suisse. Si l’Allegro moderato n° 6 puise sa source dans le Ranz des vaches, chant traditionnel a cappella emblématique de la Gruyère, le thème principal de l’Allegretto n° 7 s’inspire également d’une mélodie suisse de caractère populaire. « Le lien avec les autres compositeurs au programme est qu’ils étaient suisses ou genevois », précise-t-il.

 

Brahms et Scriabine

Au programme figureront aussi des compositeurs étrangers ayant séjourné à Genève pour y enseigner au Conservatoire ou y donner des cours privés, à l’instar du Hongrois Vincent Adler ou de l’Allemand Adolf Ruthardt, poursuit le pianiste d’origine milanaise. « Les compositeurs plus connus que nous avons choisi d’interpréter ont quant à eux un lien avec la Suisse. Une pièce de Brahms est par exemple au programme, même si ce n’est pas une œuvre créée précisément par le compositeur lors de son séjour au Lac de Thoune, nuance le musicien. Nous y avons également glissé du Scriabine, 2015 marquant le centenaire de sa mort. »

 

L’âme d’un défricheur

Adalberto Maria Riva a l’âme d’un défricheur. « Ce que j’aime, c’est faire de la recherche, sortir des sentiers battus », dit celui qui se consacre essentiellement aux compositions du 19ème siècle, jusqu’à la Première Guerre mondiale. « C’est le grand répertoire du piano. Il y a plein d’œuvres à découvrir », se réjouit-t-il. « L’idée de départ a été le disque que j’avais consacré aux compositeurs suisses romantiques », détaille Adalberto Maria Riva, qui enregistrait en 2013 – sur le piano historique Braschoss-Liszt du Château de Gruyères datant des années 1830 – un programme inspiré par le thème de la nature. Constitué de pièces de salon, il est typique de l’époque romantique, évoquant la montagne, des Alpes, des lacs, des chants populaires. « La famille de Charles Bovy-Lysberg était propriétaire du Château de Gruyères au 19ème siècle. J’ai commencé à chercher des partitions de ce compositeur pour reconstruire l’ambiance culturelle de l’époque. Ensuite, nous avons élargi le thème à la musique et la nature, un sujet par essence romantique qui se marie bien avec le paysage de la Gruyère. »

 

 

Piles de partitions

Comme l’explique Adalberto Maria Riva dans le livret de son disque Musique et nature, Charles Samuel Bovy-Lysberg – dont une rue de Genève, attenante au Victoria Hall, porte le nom – était un pianiste habile et un compositeur apprécié. Il a été l’élève de Chopin. C’est lui qui a constitué le point de départ de ses recherches. Bien conseillé et orienté vers les bibliothèques de Suisse romande, Adalberto Maria Riva se retrouve vite submergé par des piles de partitions de compositeurs presque inconnus, qu’il découvre au fur et à mesure de ses investigations musicales. Le plaisir presque sensuel de feuilleter ces anciens papiers à musique lui offre une vive émotion.

 

Concert hommage

Comment cette musique, encore muette, sonnera-t-elle sur l’instrument, se demande Adalberto Maria Riva. Rude tâche que de donner de la cohérence à une avalanche de plus de cinq cents partitions, qui doivent d’abord être copiées page à page dans les bibliothèques, puis déchiffrées au piano afin de permettre un premier, puis un deuxième choix. Voilà tout l’art du défrichage d’œuvres oubliées du répertoire, ici choisies pour célébrer le Bicentenaire de l’adhésion de Genève à la Confédération. Le pianiste très attaché à la Suisse, ayant obtenu sa virtuosité au Conservatoire de Lausanne et réalisé plusieurs enregistrements sur Espace 2, jouera à l’Eglise Saint-Germain sur un piano moderne… mais issu des ateliers du facteur genevois Pierre Fuhrer. « Un instrument suisse pour de la musique suisse », dont la moitié est dédiée à de la musique genevoise, s’enthousiasme le pianiste qui fait œuvre de pionnier.

 

Propos recueillis par Cécile Dalla Torre

 

Adalberto Maria Riva en concert à Genève, à l’Eglise Saint-Germain, les 23 et 24 août. Découvrez toute la saison des Concerts d’été à Saint-Germain sur leprogramme.ch ou sur le site www.concertstgermain.ch

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