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21e édition du Festival La Cour des Contes de Plan-les-Ouates

Publié le 05.04.2018

 

Du 27 avril au 6 mai, Plan-les-Ouates déborde de contes, et les contes débordent de Plan-les-Ouates. Le 21e festival La Cour des Contes invite à rire et à rêver avec des histoires en provenances parfois d’Iran, d’Italie, du Québec, d’Irlande, et plus généralement de l’imaginaire des conteuses et des conteurs. Le programme propose une quarantaine de spectacles, animations et ateliers pour les grands, les familles et les petits (dans le désordre), qui se dérouleront dans une douzaine de salles, espaces et lieux extraordinaires, à Plan-les-Ouates, mais aussi à Carouge, Genève, Lancy et Saint-Julien. L’affiche propose aussi une demi-douzaine de spectacles gratuits.

Rencontré à quelques semaines des trois coups, le programmateur Pascal Mabut a accepté d’évoquer La Cour des Contes dans les grandes lignes et les petits détours. Mais pour le grand voyage, il faudra attendre le 27 avril.

 

14 ans, c’est l’âge de raison, 18 ans celui de la majorité, mais 21 ans, qu’est-ce que cela représente, pour un festival de contes comme celui que vous dirigez?

A la 21e édition, j’imagine que parmi les premiers festivaliers, qui étaient venus accompagnés de leurs parents, certains reviennent désormais avec leurs propres enfants!

 

La notion de transmission est donc prépondérante?

Qu’est-ce qu’un conte? C’est une histoire qui peut se transmettre de génération en génération. C’est une tradition orale qui se prête aussi à l’envie que l’on peut avoir de partager quelque chose avec un enfant. Je ne suis pas père, mais j’observe que mes collaboratrices ont envie de transmettre cela à leurs enfants, que cela soit par la lecture, ou en racontant des histoires.

 

Une section du festival cible un jeune public, et parfois même un très jeune public (dès 18 mois). Comment le festival aborde-t-il ces moments parents-enfants?

En choisissant des salles très particulières. Nous mettons des tapis, des coussins, nous privilégions des lumières tamisées, nous voulons que les enfants puissent se sentir le plus à l’aise possible avec leurs parents.

 

Mais votre programmation rappelle que tous les contes ne sont pas destinés qu’aux enfants.

Qu’il soit composé de familles ou d’adultes, il y a un public pour les contes, ou plus généralement pour les arts du récit. Je l’observe à La Cour des Contes, et dans d’autres festivals en France, en Belgique, en Afrique, au Québec. Également dans les pays anglo-saxons – on ignore souvent l’importante tradition de la littérature orale aux États-Unis.

 

Votre programmation propose quelques spectacles en anglais ou en italien. Mais aussi un spectacle plurilingue, Café Ulysse.

Avec le Café Ulysse nous allons créer une place de village avec un café à l’Espace Vélodrome. Trois conteurs, un en français, un en arabe, un avec le langage des signes vont raconter des récits de L’Odyssée, en y ajoutant des éléments de leurs quotidiens. Le spectacle devrait aussi interroger sur la propagation des contes. Dans l’Antiquité, par exemple avec Alexandre Le Grand, L’Odyssée a voyagé en Orient. Il y a toujours eu des échanges d’histoires. Dans la première légende connue, L'épopée de Gilgamesh, on retrouve le récit du Déluge, comme quoi les histoires s’entremêlent et se propagent à travers le temps et les civilisations.

 

Le programmateur que vous êtes observe-t-il souvent ce type d’emprunts et d’échanges?

Oui. A force, on rencontre les mêmes histoires racontées différemment. Cendrillon est une histoire qui est aussi racontée dans certains pays asiatiques comme le Vietnam, et considérée là-bas comme issue d’une vieille tradition orale. Chacun pense que le conte vient de chez lui, mais les histoires voyagent et s’adaptent aux pays.

 

Nous avons évoqué L’Odyssée, Gilgamesh et le Déluge. Est-ce que les conteurs sont préoccupés par les mythes?

Ils veulent surtout transmettre des histoires. Mais des projets de récits peuvent se développer autour d’un mythe. C’est le cas avec le Café Ulysse, mais aussi avec Le retour des Rois d’Iran. Olivier Vilanove a été formé autant au conte qu’au théâtre de rue. Il est parti en résidence d’artiste à Téhéran. De cette expérience, il a retiré un spectacle dans lequel il confronte son quotidien avec Le Livre des Rois, de Ferdowsi (ndlr: recueil de légendes persanes datant du XIe siècle).

 

 

Donc tout peut être matière à contes et aux récits?

Je crois. Frédéric Naud, qui, s’est déjà intéressé à la psychiatrie, propose un projet étonnant sur cet univers. La méningite des poireaux ou les folies en musique de la donquichottesque existence de François Tosquelles, psychiatre se construit sur la base de l’expérience d’un médecin, François Toquelles, qui avait émigré de Catalogne à l’époque de la guerre d’Espagne. Il s’était installé en Lozère, où il avait co-créé une nouvelle psychiatrie. Il privilégiait les travaux artistiques avec les patients, afin que ceux-ci puissent s’ouvrir au monde, et de là comprendre leur maladie. Le spectacle s’appuie sur un journal interne de l’hôpital auquel les patients contribuaient.

 

La 21e édition propose une quarantaine de spectacles et ateliers, trop pour qu’il soit possible de tous les évoquer ici. Mais y en a-t-il qui ont surpris ou sidérés le programmateur?

Je dois mentionner le travail de Patrick Corillon, avec L’Ermite ornemental et L’appartement à trou. Il vient des arts plastiques et propose des spectacles inclassables. Dans le premier, il s’inspire d’une exposition de Richard Serra, dont il apprécie la capacité de faire des projets sans parler de lui. Suivant cet exemple, le conteur décide que, pour rester sous le charme, il ne parlerait plus jusqu’à ce que le souvenir des œuvres s’estompe en lui. La démarche, improbable, et le résultat m’ont beaucoup touché, comme au théâtre où l’on parle parfois «d’instants de grâce».

 

Le festival coproduit un spectacle, les Contes du Royaume des Deux Siciles, de David Telese. Comment La Cour des Contes envisage-t-elle ce rôle de producteur?

Il est important pour nous que les arts du récit puissent se perpétuer. Or, concrètement, il se trouve que les conteurs n’ont pas ou peu de subventionnement pour leur création. Selon Pro Helvetia (Fondation suisse pour la culture), il s’agit de lecture! Nous voulons donner la chance à de jeunes conteurs de développer des projets. Avec les moyens qui sont les nôtres.

 

Propos recueillis par Vincent Borcard

 

Festival La Cour des Contes, 21e édition, du 27 avril au 6 mai à Plan-les-Ouates.

Renseignements et réservations au +41.22.884.64.60 ou sur le site www.plan-les-ouates.ch/contes

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